Disc 1 | ||||||
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2. |
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Est-ce la main de Dieu,
Est-ce la main de Diable Qui a tisse le ciel De ce beau matin-la, Lui plantant dans le cœur Un morceau de soleil Qui se brise sur l'eau En mille eclats vermeils ? Est-ce la main de Dieu, Est-ce la main du Diable Qui a mis sur la mer Cet etrange voilier Qui, pareil au serpent, Semble se deplier, Noir et blanc, sur l'eau bleue Que le vent fait danser ? Est-ce Dieu, est-ce Diable Ou les deux a la fois Qui, un jour, s'unissant, Ont fait ce matin-la ? Est-ce l'un, est-ce l'autre ? Vraiment, je ne sais pas Mais, pour tant de beaute, Merci, et chapeau bas. Est-ce la main de Dieu, Est-ce la main de Diable Qui a mis cette rose Au jardin que voila ? Pour quel ardent amour, Pour quelle noble dame La rose de velours Au jardin que voila ? Et ces prunes eclatees, Et tous ces lilas blancs, Et ces grosseilles rouges, Et ces rires d'enfants, Et Christine si belle Sous ses jupons blancs, Avec, au beau milieu, L'eclat de ses vingt ans ? Est-ce Dieu, est-ce Diable Ou les deux a la fois Qui, un jour, s'unissant, Ont fait ce printemps-la ? Est-ce l'un, est-ce l'autre ? Vraiment, je ne sais pas Mais pour tant de beaute, Merci, et chapeau bas ! Le voilier qui s'enfuit, La rose que voila Et ces fleurs et ces fruits Et nos larmes de joie... Qui a pu nous offrir Toutes ces beautes-la ? Cueillons-les sans rien dire. Va, c'est pour toi et moi ! Est-ce la main de Dieu Et celle du Malin Qui, un jour, s'unissant, Ont croise nos chemins ? Est-ce l'un, est-ce l'autre ? Vraiment, je ne sais pas Mais pour cet amour-la Merci, et chapeau bas ! Mais pour toi et pour moi Merci, et chapeau bas ! |
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3. |
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Je m'invente un pays ou vivent des soleils
Qui incendient les mers et consument les nuits, Les grands soleils de feu, de bronze ou de vermeil, Les grandes fleurs soleils, les grands soleils soucis, Ce pays est un reve ou revent mes saisons Et dans ce pays-la, j'ai bati ma maison. Ma maison est un bois, mais c'est presque un jardin Qui danse au crepuscule, autour d'un feu qui chante, Ou les fleurs se mirent dans un lac sans tain Et leurs images embaument aux brises frissonnantes. Aussi folle que l'aube, aussi belle que l'ombre, Dans cette maison-la, j'ai installe ma chambre. Ma chambre est une eglise ou je suis, a la fois Si je hante un instant, ce monument etrange Et le pretre et le Dieu, et le doute, a la fois Et l'amour et la femme, et le demon et l'ange. Au ciel de mon eglise, brule un soleil de nuit. Dans cette chambre-la, j'y ai couche mon lit. Mon lit est une arene ou se mene un combat Sans merci, sans repos, je repars, tu reviens, Une arene ou l'on meurt aussi souvent que ca Mais ou l'on vit, pourtant, sans penser a demain, Ou mes grandes fatigues chantent quand je m'endors. Je sais que, dans ce lit, j'ai ma vie, j'ai ma mort. Je m'invente un pays ou vivent des soleils Qui incendient les mers et consument les nuits, Les grands soleils de feu, de bronze ou de vermeil, Les grandes fleurs soleils, les grands soleils soucis. Ce pays est un reve ou revent mes saisons Et dans ce pays-la, j'ai bati ta maison. |
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5. |
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J'ai eu tort, je suis revenue
dans cette ville loin perdue ou j'avais passe mon enfance. J'ai eu tort, j'ai voulu revoir le coteau ou glissaient le soir bleus et gris ombres de silence. Et je retrouvais comme avant, longtemps apres, le coteau, l'arbre se dressant, comme au passe. J'ai marche les tempes brulantes, croyant etouffer sous mes pas. Les voies du passe qui nous hantent et reviennent sonner le glas. Et je me suis couchee sous l'arbre et c'etaient les memes odeurs. Et j'ai laisse couler mes pleurs, mes pleurs. J'ai mis mon dos nu a l'ecorce, l'arbre m'a redonne des forces tout comme au temps de mon enfance. Et longtemps j'ai ferme les yeux, je crois que j'ai prie un peu, je retrouvais mon innocence. Avant que le soir ne se pose j'ai voulu voir les maisons fleuries sous les roses, j'ai voulu voir le jardin ou nos cris d'enfants jaillissaient comme source claire. Jean-Claude, Regine, et puis Jean - tout redevenait comme hier - le parfum lourd des sauges rouges, les dahlias fauves dans l'allee, le puits, tout, j'ai tout retrouve. Helas La guerre nous avait jete la, d'autres furent moins heureux, je crois, au temps joli de leur enfance. La guerre nous avait jetes la, nous vivions comme hors la loi. Et j'aimais cela. Quand j'y pense ou mes printemps, ou mes soleils, ou mes folles annees perdues, ou mes quinze ans, ou mes merveilles - que j'ai mal d'etre revenue - ou les noix fraiches de septembre et l'odeur des mures ecrasees, c'est fou, tout, j'ai tout retrouve. Helas Il ne faut jamais revenir aux temps caches des souvenirs du temps beni de son enfance. Car parmi tous les souvenirs ceux de l'enfance sont les pires, ceux de l'enfance nous dechirent. Oh ma tres cherie, oh ma mere, ou etes-vous donc aujourd'hui? Vous dormez au chaud de la terre. Et moi je suis venue ici pour y retrouver votre rire, vos coleres et votre jeunesse. Et je suis seule avec ma detresse. Helas Pourquoi suis-je donc revenue et seule au detour de ces rues? J'ai froid, j'ai peur, le soir se penche. Pourquoi suis-je venue ici, ou mon passe me crucifie? Elle dort a jamais mon enfance |
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7. |
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Tu me fais des nuits et des jours
Et des jours et des nuits d'amour. Toi, je le sais, tu pourrais meme M'ensoleiller sous la pluie meme. Avant toi, d'autres sont venus Que je n'ai jamais reconnus. Pour toi, je ne suis pas la meme. Toi, ce n'est pas pareil, je t'aime, Je t'aime. Tu me fais des nuits et des jours Et des jours et des nuits d'amour. Tu me fais la mer et les dunes Et des plages au clair de la lune. Avec ta gueule de Jesus, Tu es venu, oh bien venu Et tu m'as griffee, en douceur, La, juste a la pointe du c?ur, A la pointe du c?ur. Tu me fais des nuits et des jours Et des jours et des nuits d'amour Et dans tes bras, je fais naufrage Sans meme quitter le rivage. J'ai beau connaitre mon affaire Du boy scout jusqu'au legionnaire, Devant toi, j'etais vraiment nue, Le jour ou tu m'as devetue. Tu m'as faite, au premier matin, Timide et vierge, vierge et catin. Pour toi, je ne suis plus la meme. Toi, ce n'est pas pareil, je t'aime... |
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Je recois, a l'instant ou je rentre chez moi
Votre missive bleue, Madame. Vingt fois je la relis, et mes yeux n'y croient pas. Pourtant, c'est ecrit la, Madame Et de votre douleur, je me sens penetree Mais je ne pourrais rien, Madame. Vous savez, aujourd'hui, que de l'avoir perdu, C'est lourd a supporter, Madame. Vous demandez pardon de n'avoir pas compris Ce qu'etait notre amour, Madame. Vous n'aviez que ce fils, vous aviez peur de lui Et vous l'avez garde, Madame. Ne me demandez pas ce qu'a ete ma vie Quand vous me l'avez pris, Madame. Je me suis toujours tu, ce n'est pas aujourd'hui Que je vous le dirais, Madame. Vous eussiez prefere, je vous retrouve la, Qu'il fut mort en heros, Madame. Oui, c'eut ete plus noble, je vous crois, Que de mourir d'amour, Madame Mais qu'il soit mort ici ou qu'il mourut la-bas, Auriez-vous verse moins de larmes ? Il en a decide, lui seul avait le droit. Il faut vous resigner, Madame. C'est trop tard, maintenant, pour que je vous revienne Et vous vieillirez seule, Madame Et ne m'en veuillez pas si je parais cruelle Mais je l'ai trop aime, Madame Pour qu'a la fin du jour, pres d'une cheminee, Nous evoquions ensemble, Madame, Celui que, vous et moi, nous avons adore Et perdu tout ensemble, Madame Mais le chagrin m'egare, il faut me pardonner. J'ai mal de votre mal, Madame Mais que faire, et quoi dire, puisqu'il s'en est alle ? Je ne puis rien pour vous, Madame. Pour la seconde fois, il va nous separer. Non, je ne viendrai pas, Madame, Car, le perdre deux fois, c'est lourd a supporter. Vous me comprendrez bien, Madame. Je recois, a l'instant ou je rentre chez moi, Votre missive bleue, Madame. Vingt fois je la relis, et mes yeux n'y croient pas. Pourtant, c'est ecrit la, Madame Et de votre douleur, je me sens penetree Mais je ne puis plus rien, Madame. Vous saurez, comme moi, que de l'avoir perdu C'est lourd a supporter, Madame |
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10. |
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Si la photo est bonne,
Juste en deuxieme colonne, Y a le voyou du jour, Qui a une petite gueule d'amour, Dans la rubrique du vice, Y a l'assassin de service, Qui n'a pas du tout l'air mechant, Qui a plutot l'?il interessant, Coupable ou non coupable, S'il doit se mettre a table, Que j'aimerais qu'il vienne, Pour se mettre a la mienne, Si la photo est bonne, Il est bien de sa personne, N'a pas plus l'air d'un assassin, Que le fils de mon voisin, Ce gibier de potence, Pas sorti de l'enfance, Va faire sa derniere priere, Pour avoir trop aime sa mere, Bref, on va prendre un malheureux, Qui avait le c?ur trop genereux, Moi qui suis femme de president, J'en ai pas moins de c?ur pour autant, De voir tomber des tetes, A la fin, ca m'embete, Et mon mari, le president, Qui m'aime bien, qui m'aime tant, Quand j'ai le c?ur qui flanche, Tripote la balance, Si la photo est bonne, Qu'on m'amene ce jeune homme, Ce fils de rien, ce tout et pire, Cette crapule au doux sourire, Ce grand gars au c?ur tendre, Qu'on n'a pas su comprendre, Je sens que je vais le conduire, Sur le chemin du repentir, Pour l'avenir de la France, Contre la delinquance, C'est bon, je fais le premier geste, Que la justice fasse le reste, Surtout qu'il soit fidele, Surtout, je vous rappelle, A l'image de son portrait, Qu'ils se ressemblent trait pour trait, C'est mon ultime condition, Pour lui accorder mon pardon, Qu'on m'amene ce jeune homme, Si la photo est bonne, Si la photo est bonne, Si la photo est bonne... |
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11. |
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Pour toi soudain le gris du ciel n'est plus si gris,
pour toi soudain le poids des jours n'est plus si lourd. Voila que sans savoir pourquoi soudain tu ris, voila que sans savoir pourquoi soudain tu vis, car te voila, oui te voila amoureuse {3x}, tellement amoureuse. C'est vrai, alors le gris du ciel n'est plus si gris, c'est vrai, alors le poids des jours n'est plus si lourd. C'est vrai, alors soudain tu sais pourquoi tu ris, c'est vrai, alors soudain tu sais pourquoi tu vis, car il est la, oui il est la. Amoureuse {3x}, tellement amoureuse. Et puis, soudain, le gris du ciel redevient gris, et puis soudain le poids des jours redevient lourd. Tout est fini, tout est fini, l'amour se meurt: il est parti, il est parti et toi, tu pleures, et c'est fini, oui, c'est fini. Malheureuse {3x}. Malheureuse {3x}, tellement malheuresue |
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Disc 2 | ||||||
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Mon amour, mon beau, mon roi,
Mon enfant que j'aime, Mon amour, mon beau, ma loi, Mon autre moi-meme, Tu es le soleil couchant Tombe sur la terre, Tu es mon dernier printemps. Mon dieu, comme je t'aime. J'avais deja fait ma route. Je marchais vers le silence Avec une belle insolence. Je ne voulais plus personne. J'avancais dans un automne, Mon dernier automne, peut-etre. Je ne desirais plus rien Mais, comme un miracle, Tu surgis dans la lumiere Et toi, mon amour, mon roi, Brisant mes frontieres, Et toi, mon soleil couchant, Mon ciel et ma terre, Tu m'as donne tes vingt ans Du c?ur de toi-meme. Tu es mon dernier printemps. Mon dieu, comme je t'aime. J'ai toujours pense Que les amours les plus belles Etaient les amours incestueuses. Il y avait, dans ton regard, Il y avait, dans ton regard Une lumineuse tendresse. Tu voulais vivre avec moi Les plus belles amours, Les amours les plus belles. J'ai reouvert ma maison, Grandes, mes fenetres Et j'ai couronne ton front, J'ai baise ta bouche Et toi, mon adolescent, Toi, ma dechirure, Tu as couche tes vingt ans A ma quarantaine. Mais, a peine sont-elles nees Qu'elles sont deja condamnees, Les amours de la desesperance. Pour que ne ternisse jamais Ce diamant qui nous fut donne, J'ai brule notre cathedrale. Les amours les plus belles, Les plus belles amours Sont les amours incestueuses. Adieu mon amour, mon roi, Mon enfant que j'aime. Plus tard, tu le comprendras. Il faut, quand on aime, Partir au plus beau, je crois Et cacher sa peine. Mon amour, mon enfant roi, Je pars et je t'aime. Ceci est ma verite, Du c?ur de moi-meme (Merci a Angelica pour cettes paroles) |
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3. |
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Dans les paniers d'osier de la salle des ventes
Une gloire dechue des folles annees trente Avait mis aux encheres, parmi quelques brocantes Un vieux bijou donne par quel amour d'antan Elle etait la, figee, superbe et dechirante Ses mains qui se nouaient, se denouaient tremblantes Des mains belles encore, deformees, les doigts nus Comme sont nus, parfois, les arbres en Novembre Comme tous les matins, dans la salle des ventes Bourdonnait une foule, fievreuse et impatiente Ceux qui, pour quelques sous, rachetent pour les vendre Les tresors fabuleux d'un passe qui n'est plus Dans ce vieux lit casse, en bois de palissandre Que d'ombres enlacees, ont reve a s'attendre Les choses ont leurs secrets, les choses ont leurs legendes Mais les choses nous parlent si nous savons entendre Le marteau se leva, dans la salle des ventes Une fois, puis deux fois, alors, dans le silence Elle cria: "Je prends, je rachete tout ca Ce que vous vendez la, c'est mon passe a moi" C'etait trop tard, deja, dans la salle des ventes Le marteau retomba sur sa voix suppliante Elle vit s'en aller, parmi quelques brocantes Le dernier souvenir de ses amours d'antan Pres des paniers d'osier, dans la salle des ventes Une femme pleurait ses folles annees trente Et revoyait soudain defiler son passe Defiler son passe, defiler son passe Car venait de surgir, du fond de sa memoire Du fond de sa memoire, un visage oublie Une image cherie, du fond de sa memoire Son seul amour de femme, son seul amour de femme Hagarde, elle sortit de la salle des ventes Froissant quelques billets, dedans ses main tremblantes Froissant quelques billets, du bout de ses doigts nus Quelques billets froisses, pour un passe perdu Hagarde, elle sortit de la salle des ventes Je la vis s'eloigner, courbee et dechirante De ses amours d'antan, rien ne lui restait plus Pas meme ce souvenir, aujourd'hui disparu... |
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4. |
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Il pleut,
Il pleut, Sur les jardins alanguis, Sur les roses de la nuit, Il pleut des larmes de pluie, Il pleut, Et j'entends le clapotis, Du bassin qui se remplit, Oh mon Dieu, que c'est joli, La pluie, Quand Pierre rentrera, Il faut que je lui dise, Que le toit de la remise, A fui, Il faut qu'il rentre du bois, Car il commence a faire froid, Ici, Oh, Pierre, Mon Pierre, Sur la campagne endormie, Le silence et puis un cri, Ce n'est rien, un oiseau de la nuit, Qui fuit, Que c'est beau cette penombre, Le ciel, le feu et l'ombre, Qui se glisse jusqu'a moi, Sans bruit, Une odeur de foin coupe, Monte de la terre mouillee, Une auto descend l'allee, C'est lui, Oh, Pierre, Pierre |
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6. |
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Ils marchent le regard fier,
Mes hommes, Moi devant, et eux derriere, Mes hommes Et si j'allonge le pas, Ils me suivent pas a pas. Je leur echappe pas, Mes hommes, mes hommes. Ou que je sois, ils sont la, Mes hommes. Je n'ai qu'a tendre les bras, En somme. Je les regarde venir, Fiere de leur appartenir. C'est beau de les voir sourire, Mes hommes. Moi qui suis fille des brumes, En somme, De la nuit et de la lune, Tout comme, Quand j'arrive, le teint clair, Moi devant et eux derriere, Je comprends bien que les gens S'etonnent, s'etonnent Car, ils viennent de Tunisie, Mes hommes, Marseille, Toulon, le Midi, Mes hommes. Ils marchent avec insolence, Un petit rien dans la hanche. Ca ressemble a une danse, Mes hommes. Ils ne m'appellent Madame, Mes hommes Mais, tendrement, ils me nomment Patronne. Ils se soumettent a ma loi. Je me soumets a leur loi. Que c'est doux d'obeir A mes hommes. Tout d'amour et de tendresse, Mes hommes, M'ont fait une forteresse, Mes hommes. Non, vous ne passerez pas. C'est a eux, n'y touchez pas. Ils sont violents, quelquefois, Mes hommes, mes hommes. Ils se sont fait sentinelles, Mes hommes. Ils pourraient etre cruels, Mes hommes. Ils me veillent, comme moi Je les veille quelquefois. Moi pour eux, et eux pour moi, Mes hommes. Quand naissent les premieres feuilles D'automne, Quand le chagrin se fait lourd, Mes hommes, Vont se mettre, sans un mot, Debout autour du piano Et me disent tendrement, Patronne, patronne. C'est fou comme ils sont heureux, Mes hommes, Quand le son du piano noir Resonne. Ils vont faire leurs bagages Et on reprend le voyage. Faut qu'ils voient du paysage, Mes hommes. Quand descend la nuit furtive, Mes hommes. A pas de loup, ils s'esquivent. Personne. Ils vont chasser dans la nuit. Bergers, gardez vos brebis Qui ont le gout et l'envie, Des hommes, des hommes Car, de la blonde a la rousse, Mes hommes, Ils vont coucher leur peau douce, Mes hommes Et repartent dans la nuit, Courtois, mais pas attendris Quand ils ont croque le fruit, La pomme. Ils reviennent au matin, Mes hommes, Avec des fleurs dans les mains, Mes hommes Et restent la, silencieux, Timides, baissant les yeux En attendant que je leur Pardonne. Ils ont installe mon lit, Mes hommes, Au calme d'une prairie, Mes hommes. Je peux m'endormir a l'ombre. Ils y creuseront ma tombe Pour la longue nuit profonde Des hommes, des hommes. Pas de pleurs, pas une larme, Mes hommes, Je n'ai pas le gout du drame, Mes hommes, Continuez, le regard fier. Je serai la, comme hier, Vous devant, et moi derriere, Mes hommes |
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7. |
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Pour qui, comment quand et pourquoi ?
Contre qui ? Comment ? Contre quoi ? C'en est assez de vos violences. D'ou venez-vous ? Ou allez-vous ? Qui etes-vous ? Qui priez-vous ? Je vous prie de faire silence. Pour qui, comment, quand et pourquoi ? S'il faut absolument qu'on soit Contre quelqu'un ou quelque chose, Je suis pour le soleil couchant En haut des collines desertes. Je suis pour les forets profondes, Car un enfant qui pleure, Qu'il soit de n'importe ou, Est un enfant qui pleure, Car un enfant qui meurt Au bout de vos fusils Est un enfant qui meurt. Que c'est abominable d'avoir a choisir Entre deux innocences ! Que c'est abominable d'avoir pour ennemis Les rires de l'enfance ! Pour qui, comment, quand et combien ? Contre qui ? Comment et combien ? A en perdre le gout de vivre, Le gout de l'eau, le gout du pain Et celui du Perlimpinpin Dans le square des Batignolles ! Mais pour rien, mais pour presque rien, Pour etre avec vous et c'est bien ! Et pour une rose entr'ouverte, Et pour une respiration, Et pour un souffle d'abandon, Et pour ce jardin qui frissonne ! Rien avoir, mais passionnement, Ne rien se dire eperdument, Mais tout donner avec ivresse Et riche de depossession, N'avoir que sa verite, Posseder toutes les richesses, Ne pas parler de poesie, Ne pas parler de poesie En ecrasant les fleurs sauvages Et faire jouer la transparence Au fond d'une cour au murs gris Ou l'aube n'a jamais sa chance. Contre qui, comment, contre quoi ? Pour qui, comment, quand et pourquoi ? Pour retrouver le gout de vivre, Le gout de l'eau, le gout du pain Et celui du Perlimpinpin Dans le square des Batignolles. Contre personne et contre rien, Contre personne et contre rien, Mais pour toutes les fleurs ouvertes, Mais pour une respiration, Mais pour un souffle d'abandon Et pour ce jardin qui frissonne ! Et vivre passionnement, Et ne se battre seulement Qu'avec les feux de la tendresse Et, riche de depossession, N'avoir que sa verite, Posseder toutes les richesses, Ne plus parler de poesie, Ne plus parler de poesie Mais laisser vivre les fleurs sauvages Et faire jouer la transparence Au fond d'une cour aux murs gris Ou l'aube aurait enfin sa chance, Vivre, Vivre Avec tendresse, Vivre Et donner Avec ivresse ! |
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8. |
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Allez savoir pourquoi, au piano, ce jour-la,
Y avait une musique sur le bout de mes doigts, Une musique. Allez savoir pourquoi, les pianos jouent parfois De droles de musiques sur le bout de nos doigts. Allez savoir, pourquoi. Dans le salon vieil or ou j'aime travailler Tout en regardant vivre mes objets familiers, Je jouais, jouais Pendant que, sur mon mur, dansait la Loie Fuller, Sous l'?il enamoure et l'air patibulaire De Fragson, Fragson. Allez savoir pourquoi, il existe des nuits Ou, sous un ciel de soie, des papillons de nuit Volent, multicolores. Allez savoir pourquoi, mais c'etait une nuit Ou, seule a mon piano, j'etais au paradis Quand tout a coup, venu de ta planete, Le telephone sonne sur mon ile deserte Et c'etait toi, o toi. Allo, allo, mon c?ur, me murmurait ta voix. Je n'etais pas ton c?ur et c'etait une erreur Mais, je n'ai pas raccroche Et tu n'as pas raccroche Et si je n'ai jamais su qui tu cherchais, J'ai tout de meme compris que l'on s'etait trouves Et, depuis ce jour-la ou tu l'as decouverte, Tu es le Robinson de mon ile deserte, Tu es le Robinson de mon ile deserte Parce qu'un jour, un piano, allez savoir pourquoi, Jouait une musique sur le bout de mes doigts, Une musique, Parce qu'un jour, un piano, Un piano, un piano... |
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9. |
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Quand ceux qui vont, s'en vont aller,
Quand le dernier jour s'est leve Dans la lumiere blonde, Quand ceux qui vont, s'en vont aller, Pour toujours et a tout jamais Sous la terre profonde, Quand la lumiere s'est voilee, Quand ceux que nous avons aimes Vont fermer leur paupieres, Si rien ne leur est epargne, Oh, que du moins soit exaucee Leur derniere priere : Qu'ils dorment, s'endorment Tranquilles, tranquilles. Qu'ils ne meurent pas au fusil, En expirant deja la vie Qu'a peine, ils allaient vivre, Qu'ils ne gemissent pas leurs cris, Seuls, rejetes ou incompris, Eloignes de leurs freres, Qu'ils ne meurent pas en troupeau Ou bien poignardes dans le dos Ou qu'ils ne s'acheminent En un long troupeau de la mort, Sans ciel, sans arbre et sans decor, Le feu a la poitrine. Eux qui n'avaient rien demande Mais qui savaient s'emerveiller D'etre venus sur terre, Qu'on leur laisse choisir, au moins, Le pays, fut-il lointain, De leur heure derniere. Qu'ils aillent donc coucher leurs corps Dessous les ciels pourpres et or Au-dela des frontieres Ou qu'ils s'endorment, enlaces, Comme d'eternels fiances Dans la blonde lumiere. Quand ceux qui vont s'en vont aller Pour toujours et a tout jamais Au jardin du silence Sous leur froide maison de marbre Dans les grandes allees sans arbre, Je pense a vous, ma mere. Qu'ils aient, pour dernier souvenir, La chaleur de notre sourire Comme etreinte derniere. Peut-etre qu'ils dormiront mieux Si nous pouvons fermer leurs yeux. Je pense a vous, ma mere. Qu'ils dorment, s'endorment Tranquilles, tranquilles... |
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10. |
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Il automne, a pas furtifs,
Il automne a pas feutres, Il automne a pas craquants Sous un ciel pourpre et dore. Sur les jardins denudes Se refletent. en transparence Les brumes d'automne rouillees, Rouillees Dans la foret de tes cheveux Aux senteurs de poivres meles Et sur nos nuits de mi-novembre, Il automne miraculeux, Il automne miraculeux. Il automne, il automne des chrysanthemes Sur leurs deux c?urs endeuilles. Il automne des sanglots longs Sous un ciel gris delave Et, de la gare au cimetiere Ou ils reviennent chaque annee, De banc de bois en banc de pierre Et jusqu'a la derniere allee, On les voit d'escale en escale Qui n'en peuvent plus d'etre vieux. Sur ce chemin de leur calvaire Qu'ils refont depuis tant des annees, Il automne desespere, Il automne desespere. Il automne, il automne, Il automne des pommes rouges Sur des cahiers d'ecoliers. Il automne des chataignes Aux poches de leur tablier. Regarde les mesanges En haut du grand marronnier. Il y a des rouges-gorges Au jardin de Batignolles Et les enfants de novembre Croient que sont venus du ciel Ces petits oiseaux de plumes Echappes d'un arc-en-ciel. Pour les enfants de novembre Qui ramenent, emerveilles, Un peu de l'automne rousse Au fond de leur tablier, Il automne le paradis Bien plus beau que le paradis. Il automne, il automne Il automne a pas furtifs, A pas feutres, A pas craquants Et, sur nos nuits de mi-novembre, Il automne miraculeux, Miraculeux, mon amour... |
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15. |
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Regarde :
Quelque chose a change. L'air semble plus leger. C'est indefinissable. Regarde : Sous ce ciel dechire, Tout s'est ensoleille. C'est indefinissable. Un homme, Une rose a la main, A ouvert le chemin Vers un autre demain. Les enfants, Soleil au fond des yeux, Le suivent deux par deux, Le c?ur en amoureux. Regarde : C'est fanfare et musique, Tintamarre et magique, Feerie feerique. Regarde : Moins chagrins, moins voutes, Tous, ils semblent danser Leur vie recommencee. Regarde : On pourrait encore y croire. Il suffit de le vouloir Avant qu'il ne soit trop tard. Regarde : On en a tellement reve Que, sur les mur betonnes, Poussent des fleurs de papier Et l'homme, Une rose a la main, Etoile a son destin, Continue son chemin. Seul, Il est devenu des milliers Qui marchent, emerveilles Dans la lumiere eclatee. Regarde : On a envie de se parler, De s'aimer, de se toucher Et de tout recommencer. Regarde : Plantee dans la grisaille, Par-dela les murailles, C'est la fete retrouvee. Ce soir, Quelque chose a change. L'air semble plus leger. C'est indefinissable. Regarde : Au ciel de notre histoire, Une rose, a nos memoires, Dessine le mot espoir... |
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16. |
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Du plus loin, que me revienne,
L'ombre de mes amours anciennes, Du plus loin, du premier rendez-vous, Du temps des premieres peines, Lors, j'avais quinze ans, a peine, Cœur tout blanc, et griffes aux genoux, Que ce furent, j'etais precoce, De tendres amours de gosse, Ou les morsures d'un amour fou, Du plus loin qu'il m'en souvienne, Si depuis, j'ai dit "je t'aime", Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous, C'est vrai, je ne fus pas sage, Et j'ai tourne bien des pages, Sans les lire, blanches, et puis rien dessus, C'est vrai, je ne fus pas sage, Et mes guerriers de passage, A peine vus, deja disparus, Mais a travers leur visage, C'etait deja votre image, C'etait vous deja et le cœur nu, Je refaisais mes bagages, Et poursuivais mon mirage, Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous, Sur la longue route, Qui menait vers vous, Sur la longue route, J'allais le cœur fou, Le vent de decembre, Me gelait au cou, Qu'importait decembre, Si c'etait pour vous, Elle fut longue la route, Mais je l'ai faite, la route, Celle-la, qui menait jusqu'a vous, Et je ne suis pas parjure, Si ce soir, je vous jure, Que, pour vous, je l'eus faite a genoux, Il en eut fallu bien d'autres, Que quelques mauvais apotres, Que l'hiver ou la neige a mon cou, Pour que je perde patience, Et j'ai calme ma violence, Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous, Les temps d'hiver et d'automne, De nuit, de jour, et personne, Vous n'etiez jamais au rendez-vous, Et de vous, perdant courage, Soudain, me prenait la rage, Mon Dieu, que j'avais besoin de vous, Que le Diable vous emporte, D'autres m'ont ouvert leur porte, Heureuse, je m'en allais loin de vous, Oui, je vous fus infidele, Mais vous revenais quand meme, Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous, J'ai pleure mes larmes, Mais qu'il me fut doux, Oh, qu'il me fut doux, Ce premier sourire de vous, Et pour une larme, Qui venait de vous, J'ai pleure d'amour, Vous souvenez-vous ? Ce fut, un soir, en septembre, Vous etiez venus m'attendre, Ici meme, vous en souvenez-vous ? A vous regarder sourire, A vous aimer, sans rien dire, C'est la que j'ai compris, tout a coup, J'avais fini mon voyage, Et j'ai pose mes bagages, Vous etiez venus au rendez-vous, Qu'importe ce qu'on peut en dire, Je tenais a vous le dire, Ce soir je vous remercie de vous, Qu'importe ce qu'on peut en dire, Je suis venue pour vous dire, Ma plus belle histoire d'amour, c'est vous... |
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17. |
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Il pleut sur Nantes, donne-moi la main
Le ciel de Nantes rend mon cœur chagrin Un matin comme celui-la, il y a juste un an deja La ville avait ce teint blafard lorsque je sortis de la gare Nantes m'etait encore inconnue, je n'y etais jamais venue Il avait fallu ce message pour que je fasse le voyage "Madame soyez au rendez-vous, vingt-cinq rue de la Grange-au-Loup Faites vite, il y a peu d'espoir, il a demande a vous voir." A l'heure de sa derniere heure, apres bien des annees d'errance Il me revenait en plein cœur, son cri dechirait le silence Depuis qu'il s'en etait alle, longtemps je l'avais espere Ce vagabond, ce disparu, voila qu'il m'etait revenu Vingt-cinq rue de la Grange-au-Loup, je m'en souviens du rendez-vous Et j'ai grave dans ma memoire cette chambre au fond d'un couloir Assis pres d'une cheminee, j'ai vu quatre hommes se lever La lumiere etait froide et blanche, ils portaient l'habit du dimanche Je n'ai pas pose de questions a ces etranges compagnons J'ai rien dit, mais a leurs regards, j'ai compris qu'il etait trop tard Pourtant j'etais au rendez-vous, vingt-cinq rue de la Grange-au-Loup Mais il ne m'a jamais revue, il avait deja disparu Voila, tu la connais l'histoire, il etait revenu un soir Et ce fut son dernier voyage, et ce fut son dernier rivage Il voulait avant de mourir se rechauffer a mon sourire Mais il mourut a la nuit meme sans un adieu, sans un "je t'aime" Au chemin qui longe la mer, couche dans le jardin des pierres Je veux que tranquille il repose, je l'ai couche dessous les roses Mon pere, mon pere Il pleut sur Nantes et je me souviens Le ciel de Nantes rend mon cœur chagrin. |
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